Une femme a toujours besoin d’un loquet… surtout si elle craint d’être enceinte.
À tout juste quinze ans, Arégonde ne se pose pas beaucoup de questions. Pourquoi ? Parce qu’elle aime Childeric. Et elle vient de se donner à lui, sur l’herbe printanière, parmi ses moutons… Elle sent encore les mains d berger glisser sur sa peau… ses lèvres, sur ses tétons…
Elle sourit, dévale la pente, court dans les rayons de soleil.
À l’approche du bourg, elle ralentit, se met à marcher comme si rien ne s’était passé. Elle n’en soufflera mot à personne. Si ! À son amie Lanthilde, de cinq ans son aînée. Elle sait tant de choses, Lanthilde !
Sur le chemin, elle croise des gamins portant des fagots, des fillettes aussi. Ils se saluent. Sans plus.
La cloche sonne, annonce la fin de la matinée.
Arégonde s’arrête, tourne la tête vers les enfants qui rentrent chez eux. Et soudain, frissonne. Et si… ? Sa mère ne lui a-t-elle pas dit de se méfier des homme, parce qu’à l’annonce d’un drôle à venir, ils ne les connaissent plus ?
Arégonde ne rit plus, fonce retrouver son amie aux champs. Comme c’est l’heure de la pause, elle entraîne Lanthilde vers la haie en fleurs blanches.
— Que se passe-t-il ? Un malheur est arrivé ?
Arégonde hésite un instant, puis se lance, avoue son bonheur et… sa crainte.
Silence entre les deux jeunes femmes.
Lanthilde hoche la tête, la comprend, ne la juge pas. Aimer n’est pas un crime. Et rien ne les protège vraiment d’avoir des loupiots, sauf les plantes abortives ou les coups dans le ventre … Devant le regard interrogateur, impatient d’Arégonde, elle cesse de penser et lui parle du test du loquet.
— Le test du loquet ? C’est quoi ?
— Tu prends une bassine, tu y mets un loquet ou une clef, mais un loquet c’est bien mieux. Tu pisses dessus. Et tu laisses macérer pendant trois ou quatre heures. Après tu jettes le tout.
— Et alors ?
— Si l’empreinte du loquet est restée sur le fond de ta cuvette, et bah… t’attends un petiot.
Arégonde regarde son amie, réfléchit…, mais pas très longtemps : la solution est évidente. Alors, elle attend que tout le village retourne aux champs, puis, après un regard autour d’elle, court arracher quelques loquets aux huis des chaumières.
L’histoire ne dit pas si elle a fini dans les bras de Childéric ou sur un pilori, comme voleuse de loquets.
Note : le test du loquet est décrit dans « le livre des quenoilles ou Euvangile des quenouilles, XVe siècle.
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Et une autre histoire,
dans le prochain numéro du blog.